Tout l’enjeu du chapitre 22 de la Genèse est concentré dans le « fils unique ». Cette expression revient deux fois aux versets 2 et 12.
Ce fils, Isaac, naît en Gn 21. Il est alors le don de Dieu tant attendu par Abraham. Ce dernier est en effet âgé quand son fils naît. Mais Dieu intervient dès le début du chapitre suivant en disant : « Prends ton fils ton unique celui que tu aimes » (Gn 22,2). Abraham s’est approprié le don : c’est son fils unique et seulement le sien. Dieu lui demande alors de le lui sacrifier. Abraham va marcher durant trois jours avec son fils à ses côtés. Il va méditer cette demande. Au moment fatidique, au verset 10, Dieu intervient de nouveau par son Ange. Voilà ce qu’il dit au verset 12 : « tu n’as pas retenu ton fils ton unique loin de moi ». Ces deux traductions littérales de l’hébreu montrent un parallélisme : autour de « ton fils ton unique », « prends » est opposé à « tu n’as pas retenu » et « celui que tu aimes » à « loin de moi ». On comprend le mouvement intérieur d’Abraham. Alors qu’au verset 2, il gardait son fils près de lui ; au verset 12, il l’a retourné à Dieu.
Ainsi, nous comprenons mieux cet épisode. La mise à l’épreuve d’Abraham lui a permis de se dépouiller du don que Dieu lui avait fait. Et nous ? Comme pour Abraham, les dons de Dieu sont faits pour nous permettre de vivre davantage. Mais nous les approprier peut nous détourner de Dieu tout en nous recroquevillant sur nous-même. Nous en dépouiller nous permet de Le rejoindre de plus en plus. Nous nous abandonnons pour nous donner à Lui. Dieu nous appelle donc à accueillir ses dons sans nous les approprier.
Image : Sacrifice d’Isaac, Rembrandt